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riche ou pauvre. Mais du haut ou bas prix en argent de certaines espèces de denrées relativement au prix de certaines autres, nous pouvons inférer, avec un degré de probabilité qui approche presque de la certitude, que le pays était riche ou pauvre, que la majeure partie de ses terres étaient améliorées ou abandonnées, et qu’il était alors ou dans un état plus ou moins barbare, ou dans un état plus ou moins civilisé.

Toute hausse dans le prix pécuniaire des denrées qui proviendrait entièrement d’une dégradation dans la valeur de l’argent, tomberait également sur toutes les espèces de denrées et marchandises et ferait hausser universellement leur prix d’un tiers, d’un quart ou d’un cinquième, selon que L’argent viendrait à perdre un tiers, un quart ou un cinquième de sa première valeur. Mais cette hausse du prix des denrées, sur laquelle on a tant raisonné, ne tombe pas également sur tous les genres de denrées. En prenant le cours de ce siècle pour faire un taux moyen, il est bien reconnu, même par ceux qui rapportent cette hausse à une dégradation dans la valeur de l’argent, que le prix du blé a beaucoup moins haussé que celui de quelques autres sortes de denrées. On ne peut donc pas entièrement attribuer à la dégradation de la valeur de L’argent la hausse du prix de ces autres sortes de denrées. Il faut bien y faire entrer en compte quelque autre cause, et peut-être que celles que j’ai indiquées ci-dessus pourraient bien, sans recourir à cette prétendue dégradation de la valeur de l’argent, fournir une raison suffisante de la hausse de ces espèces particulières de denrée, dont le prix se trouve actuellement avoir haussé relativement à celui du blé.

Quant au prix du blé lui-même, il a été, pendant les soixante-quatre premières années de ce siècle et avant cette dernière suite extraordinaire de mauvaises années, un peu plus bas qu’il ne l’avait été pendant les soixante-quatre dernières années du siècle précédent. Ce fait est attesté non-seulement par les comptes du marché de Windsor, mais encore par les registres publics de tous les différents comtés d’Écosse, et par les relevés des prix de plusieurs différents marchés de France, qui ont été recueillis avec beaucoup de soin et d’exactitude par M. Messance[1] et par M. Dupré de Saint-Maur[2]. La preuve est plus

  1. Recherche sur la population de différentes villes de France.
  2. Essai sur les monnaies, ou Réflexions sur le rapport entre l’argent et les denrées. Paris, 1746.