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prodigieusement augmenté dans le cours de celui-ci. C’est aussi dans le cours de ce siècle que les Suédois et les Danois commencèrent à commercer dans l’Inde. Les Russes mêmes font actuellement d’une manière régulière le commerce à la Chine par des espèces de caravanes qui vont à Pékin par terre, à travers la Sibérie et la Tartarie. Si nous en exceptons le commerce des Français, que la dernière guerre a anéanti ou peu s’en faut, celui de tous ces autres peuples aux Indes orientales a été presque continuellement en augmentant. La consommation toujours croissante en Europe des marchandises de l’Inde est assez forte, à ce qu’il paraît, pour leur fournir à tous les moyens d’augmenter successivement leurs affaires. L’usage du thé, par exemple, était très-peu répandu en Europe avant le milieu du siècle dernier. Aujourd’hui, la valeur du thé importé annuellement par la Compagnie des Indes anglaises, pour la consommation de l’Angleterre, s’élève à plus d’un million et demi par an, et ce n’est même pas assez dire ; une quantité très-considérable entrant habituellement en fraude par les ports de Hollande, de Gottenbourg en Suède, et aussi des côtes de France, tant qu’a prospéré la Compagnie des Indes de ce dernier pays[1]. La consom-

  1. La consommation du thé a considérablement augmenté depuis 1775. La quantité de thé légalement importé pendant les trois ans se terminant en 1783, s’éleva environ à 5 millions et demi de livres poids : mais on estime qu’environ 7 millions et demi de livres poids, en sus de la première quantité, avaient été introduites en fraude, ce qui élève le total des importations à environ 13 millions de livres poids. Cet excès de contrebande était l’objet des droits oppressifs mis sur le thé ; en 1784, après avoir essayé tous les moyens de réprimer la contrebande, M. Pitt réduisit les droits de 119 à 12 1/2 pour cent, ad valorem. Cette mesure eut le plus grand succès. La contrebande, ayant cessé d’être lucrative, fut immédiatement abandonnée, et la quantité du thé légalement importé s’accrut dans une proportion triple en moins de deux ans. La consommation du thé continua de s’accroitre avec une grande rapidité jusqu’en 1800 ; mais depuis cette époque jusqu’en 1819, elle resta stationnaire, ce qu’il faut attribuer, en grande partie, à l’augmentation des droits pendant cet intervalle ; la manière dont la Compagnie des Indes orientales approvisionnait le marché y entre aussi pour quelque chose. Depuis 1817, où la consommation de la Grande-Bretagne et de l’Irlande s’éleva environ à 24 millions de livres poids, cette consommation alla toujours en augmentant, jusqu’en 1833 où elle s’éleva à 31,829,620 livres poids. En 1834, les importations du commerce privé, ajoutées à l’approvisionnement accumulé par la Compagnie des Indes orientales, firent baisser de beaucoup les prix, et la consommation fit de si grands progrès, qu’en 1838 elle s’élevait à environ 40 millions de livres poids, produisant un revenu de 4 millions de livres sterling ! À la première application du nouveau système, les droits furent fixés à 1 schelling 6 deniers, 2 schellings 2 deniers, et 3 schellings la livre, suivant la qualité ; mais cette variation de droits n’ayant pas été trouvée favorable, fut abandonnée en 1855, où un droit uniforme de 2 schellings 1 denier fut imposé sur tous les thés, sans égard à la qualité. En supposant que le droit présent équivaut à une taxe de 100 pour % ad valorem, ce que l’on croit généralement, il en résulte que le thé annuellement consommé coûte, au peuple de la Grande-Bretagne et de l’Irlande, 8,000,000 livres 200 millions de francs), sans compter les profits des marchands en détail. Mac Culloch.