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mières ont été beaucoup plus bas que le taux moyen du siècle, malgré une ou deux années de cherté qui s’y trouvent, de même les dernières ont été beaucoup au-dessus de ce taux, quoiqu’elles soient coupées par une ou deux années de bon marché, telle, par exemple, que l’année 1759. Si les premières n’ont pas été autant au-dessous du taux moyen général, que les dernières ont été au-dessus, il faut vraisemblablement l’attribuer à la prime. Le changement a évidemment été trop subit pour pouvoir l’attribuer à une modification dans la valeur de l’argent, qui est toujours un événement lent et graduel. Un effet soudain ne peut être expliqué que par une cause qui agisse d’une manière soudaine, telle que la variation accidentelle des saisons.

Il est vrai que le prix du travail en argent s’est élevé, en Angleterre, pendant le cours de ce siècle. Cette hausse cependant paraît être bien moins l’effet d’une diminution de la valeur de l’argent dans le marché général de l’Europe, que l’effet d’une augmentation de la demande de travail en Angleterre, provenant de la grande prospérité de ce pays et des progrès qui s’y sont accomplis presque universellement. On a observé qu’en France, où la prospérité n’est pas aussi grande, le prix du travail en argent a baissé graduellement avec le prix moyen du blé, depuis le milieu du dernier siècle. On dit que, dans le siècle dernier, ainsi que dans celui-ci, le salaire journalier du travail de manœuvre y a été presque uniformément à environ un vingtième du prix moyen du setier de blé froment, mesure qui contient un peu plus de quatre boisseaux de Winchester. J’ai déjà fait voir[1] qu’en Angleterre la récompense réelle du travail, la quantité réelle de choses propres aux besoins et aisances de la vie qui est donnée à l’ouvrier, a augmenté considérablement pendant le cours de ce siècle. La hausse de son prix pécuniaire paraît avoir eu pour cause, non une diminution de la valeur de l’argent dans le marché général de l’Europe, mais une hausse du prix réel du travail dans le marché particulier de l’Angleterre, due aux circonstances heureuses dans lesquelles se trouve ce pays.

L’argent a dû continuer, pendant quelque temps après la première découverte de l’Amérique, à se vendre à son ancien prix ou très-peu au-dessous. Les profits de l’exploitation des mines furent très-forts, et excédèrent de beaucoup leur taux naturel ; mais ceux qui importaient ce métal en Europe s’aperçurent bientôt qu’ils ne pouvaient pas dé-

  1. Chap. viii de ce livre.