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la même période et qui, sans occasionner sans doute aucune rareté dans le blé, ni peut-être aucune augmentation dans la quantité réelle d’argent communément payée pour le prix du blé, doit avoir nécessairement amené quelque augmentation dans la somme nominale de ce prix. Cet événement, ce fut la grande dégradation causée dans la monnaie d’argent par le frai et par les rogneurs. Ce mal commença sous le règne de Charles II, et alla toujours en augmentant jusques en 1693, auquel temps, à ce que nous dit M. Lowndes, la monnaie d’argent courante était, en moyenne, à près de 25 pour 100 au-dessous de sa valeur légale. Mais la somme nominale qui constitue le prix de marché des choses se règle nécessairement bien moins sur la quantité d’argent que la monnaie devrait contenir d’après la loi, que sur celle que cette monnaie contient alors effectivement, autant qu’on en peut juger par l’expérience. Cette somme nominale doit donc être nécessairement plus forte, quand la monnaie est dégradée par le frai et par les rogneurs, que quand elle approche de sa valeur légale.

Dans le cours de ce siècle, la monnaie d’argent n’a été dans aucun temps aussi fort au-dessous de son poids légal, qu’elle l’est aujourd’hui. Mais, tout usée qu’elle est, sa valeur est soutenue par la monnaie d’or contre laquelle on peut l’échanger ; car, quoique la monnaie d’or fût aussi très-usée avant la dernière refonte, elle l’était beaucoup moins que la monnaie d’argent. En 1695, au contraire, la valeur de la monnaie d’argent n’était pas soutenue par la monnaie d’or, une guinée s’échangeant alors communément contre 30 schellings de cette monnaie usée et rognée. Avant la dernière refonte de la monnaie d’or, le prix du lingot d’argent ne s’élevait guère au-dessus de 5 sch. 7 deniers l’once, ce qui n’est que 5 deniers au-dessus du prix qu’on en donne à la Monnaie[1]. Mais en 1695, le lingot d’argent était communément à 6 sch. 5 deniers l’once[2], ce qui fait 15 deniers au-dessus du prix pour lequel il était reçu à la Monnaie. Ainsi, même avant la dernière refonte de la monnaie d’or, les monnaies d’or et d’argent, prises ensemble, n’étaient pas estimées à plus de 8 pour 100 au-dessous de leur valeur légale, en les comparant avec le prix du lingot d’argent. Au contraire, en 1695, elles étaient estimées à 25 pour 100 au-dessous de cette valeur. Mais au commencement de ce siècle, im-

  1. Voyez ci-dessus, chap v.
  2. Essai sur la monnaie d’argent, par M. Lowndes, page 68.