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Comme le prix de l’or et de l’argent hausse naturellement dans une nation à mesure qu’elle s’enrichit, à moins que la découverte accidentelle de mines plus abondantes ne le fasse baisser, il s’ensuit que, quel que puisse être l’état des mines, ce prix sera naturellement plus élevé dans un pays riche que dans un pays pauvre. L’or et l’argent, comme tout autre marchandise, cherchent naturellement le marché où l’on en offre le meilleur prix et, pour quelque denrée que ce soit, le meilleur prix sera toujours offert par le pays qui est le plus en état de le donner. Le travail, comme il faut toujours se le rappeler, est le prix qui, en dernière analyse, paye tout, et dans deux pays où le travail sera également bien salarié, le prix du travail en argent sera en proportion du prix de la subsistance de l’ouvrier ; or, l’or et l’argent s’é-


    renchérissement de certains articles, et pour juger dans un échange quel est celui des deux termes dont se compose cet échange qui gagne le plus et qui procure le plus d’avantages à celui qui le produit ou le possède.

    C’est dans ce sens absolu qu’Adam Smith a considéré l’or et l’argent quand il a observé que ces métaux étaient nécessairement moins chers en Portugal et en Espagne que dans les contrées où on les transporte de l’un ou de l’autre de ces pays, puisque dans les contrées qui importent cet or ou cet argent, il faut ajouter à la valeur que les matières avaient déjà acquise en Espagne ou en Portugal, le surcroît de travail et de risques qui donne lieu aux frais de transport et d’assurance.

    Voilà ce que M. Ricardo a jugé à propos de contredire : « Quand on parle, dit-il, du plus ou moins de valeur de l’or et de l’argent, ou de toute autre marchandise, en différents pays, on devrait toujours choisir une mesure pour estimer cette valeur, si l’on veut être intelligible. Par exemple, quand on dit que l’or est plus cher en Angleterre qu’en Espagne, si on ne l’évalue pas en le comparant avec d’autres marchandises, quel peut être le sens de cette assertion ? Si le blé, les olives, l’huile, le vin et la laine sont à meilleur marché en Espagne qu’en Angleterre, l’or estimé au moyen de ces denrées se trouvera être plus cher en Espagne*. »

    L’argument de M. Ricardo consiste à ne pas prendre les mots dans le sens qu’Adam Smith a voulu leur donner. Le critique ne veut voir que le résultat des échanges, sans considérer séparément chacun des deux termes de l’échange. Je conviens que pour celui qui trafique et qui calcule le profit qu’il peut faire, le résultat de l’échange est le plus souvent le seul point important. Mais il n’en est pas de même pour l’observateur qui s’occupe de l’intérêt général, et qui a souvent be-

    *. Principes d’économie politique, etc., tom II, page 276 de la traduction française.)