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Il faut toujours se rappeler que c’est le travail, et non aucune autre marchandise ou classe de marchandises particulières, qui est la mesure réelle de valeur, tant pour l’argent que pour toute autre marchandise quelconque[1].

Mais dans des pays presque déserts ou très-peu habités, le bétail, la volaille, le gibier de toute espèce, etc., étant des productions spontanées de la nature, s’y multiplient souvent en beaucoup plus grande quantité que ne l’exige la consommation des habitants. Dans un tel état de choses, l’offre excède communément la demande. Ainsi, ces sortes de denrées, suivant les différents états où sera la société, suivant les différents degrés d’opulence ou d’industrie où elle se trouvera, représenteront ou vaudront des quantités de travail fort différentes.

Quel que soit l’état de la société, quel que soit son degré de civilisation, le blé est toujours une production de l’industrie des hommes. Or, le produit moyen de toute espèce d’industrie se subordonne toujours avec plus ou moins de précision à la consommation moyenne, la quantité moyenne de l’approvisionnement à la quantité moyenne de la demande ; d’ailleurs, dans les différents degrés d’amélioration d’un pays, il faudra toujours, en moyenne, des quantités de travail à peu près égales, pour faire croître des quantités égales de blé dans un même sol et sous un même climat, l’augmentation continuelle qui a lieu dans la puissance productive du travail, à mesure que la culture va en se perfectionnant, étant plus ou moins contre-balancée par l’accroissement continuel du prix des bestiaux, qui sont les principaux instruments de l’agriculture. Nous devons donc, d’après ceci, être bien certains qu’en tout état possible de la société, dans tout degré de civilisation, des quantités égales de blé seront une représentation ou un équivalent plus juste de quantités égales de travail, que ne le seraient des quantités égales de toute autre partie du produit brut de la terre. En conséquence, le blé, ainsi qu’il a été déjà observé, est, dans tous les différents degrés de richesse et d’amélioration de la société, une mesure de valeur plus exacte que toute autre marchandise ou que toute autre classe de marchandises ; ainsi, dans tous ces différents degrés, nous pouvons mieux juger de la valeur réelle de l’argent, en le comparant avec le blé, qu’en

  1. Voyez le chap. v de ce livre.