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terme moyen, 175 livres de Paris ; ce qui, réduisant le prix du cent pesant d’Angleterre à environ 8 schellings sterl., ne fait pas le quart de ce qu’on paye communément les sucres bruts ou moscouades[1] qu’on importe de nos colonies, et pas la sixième partie du prix du plus beau sucre blanc. À la Cochinchine, la majeure partie des terres cultivées est employée à produire du blé et du riz, la nourriture de la masse du peuple. Les prix respectifs du blé, du riz et du sucre ont probablement entre eux une proportion naturelle, celle qui s’établit naturellement entre les différents produits de la plupart des terres cultivées, et qui est capable d’indemniser le propriétaire et le fermier, aussi exactement qu’il est possible de l’apprécier, des dépenses qu’ils ont coutume de faire pour l’amélioration primitive et pour la culture annuelle. Mais, dans nos colonies à sucre, le prix du sucre n’a pas cette proportion avec le prix du produit d’un champ de blé ou de riz, en Europe ou en Amérique. On dit ordinairement qu’un planteur compte, pour se défrayer de toutes ses dépenses de culture, sur le rhum et les mélasses seulement, et que son sucre est pour lui un profit net[2]. Si cela est vrai, car je ne prétends pas l’affirmer, c’est comme si le fermier d’une terre à blé comptait payer tous ses frais de culture avec ses pailles, et que le grain fût tout profit pour lui. Nous voyons souvent des compagnies de négociants, à Londres et dans d’autres villes de commerce, acheter dans nos colonies à sucre des terres incultes, qu’ils se proposent de mettre en valeur, et de cultiver avec profit par le moyen des facteurs ou gérants, et cela malgré la grande distance, l’incertitude des retours et la mauvaise administration de la justice en ces contrées. Or, personne n’entreprendra de mettre en valeur et de cultiver de la même manière les terres les

  1. Le sucre brut ou moscouade, moscovado ou crude sugar, est celui qui n’a subi d’autre préparation que la clarification ordinaire des chaudières. Le sucre brun ou passé, strained sugar, a de plus été filtré à travers la chausse ; mais ni l’un ni l’autre n’a été terré.
  2. Les renseignements que contient le texte concernant les profits des planteurs de sucre étaient probablement très-exagérés à l’époque où le Dr Smith écrivait. Il y a longtemps d’ailleurs qu’ils ont cessé d’être vrais. Loin d’être profitable à l’excès, l’industrie des planteurs de sucre a été généralement le contraire depuis trente ans. La culture a été trop étendue, et la quantité de produit apportée au marché a été si grande, qu’elle a fréquemment réduit le prix à un taux qui ne dépasse guère la somme nécessaire pour couvrir les dépenses de culture et l’acquittement des droits. Mac Culloch.