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vues, que ses théories peuvent être considérées comme de magnifiques découvertes. C’est lui qui a le premier démontré la nécessité d’une alliance perpétuelle entre le capital et le travail, trop souvent divisés. Les économistes les plus hardis de l’époque actuelle n’ont rien écrit de plus énergique que le tableau qu’il a tracé des coalitions d’ouvriers et de maîtres, ni rien de plus éloquent que ses irrésistibles manifestes en faveur de la liberté de l’industrie. C’est à lui que nous devons toutes les libertés dont on abuse tant aujourd’hui, et que des novateurs rétrogrades voudraient proscrire, pour s’épargner l’embarras de les organiser. Nul n’a porté des regards plus sûrs et plus profonds sur les éléments du crédit. Son chapitre des Banques est resté un modèle inimitable de clarté, de logique et de prudence. Adam Smith a tracé d’une main ferme la limite qu’elles ne devaient pas franchir ; et quiconque, depuis, peuple ou roi, a osé s’écarter de ses sages prescriptions, et se suspendre aux ailes d’Icare, pour nous servir de l’expression de l’auteur, est tombé dans l’abîme.

On éprouve, en étudiant ce bel ouvrage, un sentiment particulier de satisfaction qui est dû à la rectitude des idées et à l’enchaînement rigoureux des déductions. Une fois le sujet lancé, si j’ose dire, Adam Smith ne lui laisse ni paix ni trêve : il l’examine sous toutes ses faces, l’appuie de mille exemples, le vivifie de mille comparaisons, et l’inonde, en un mot, de lumière. Ses voyages lui fournissent des observations de tout genre qu’il distribue avec un art merveilleux, et sa philosophie l’aide à en tirer le meilleur parti. Son indépendance ne recule devant aucune conséquence, dès qu’il s’agit des intérêts de la vérité. Quelquefois même, ces intérêts lui inspirent des accents d’indignation qui feraient honneur aux écrivains les plus avancés de nos jours. L’esprit de monopole, source de tant de guerres et de crimes, lui était surtout antipathique. « Le commerce, dit-il, qui, pour les nations comme pour les individus, devrait être un lien d’union et d’amitié, est devenu la source la plus féconde des animosités et de la discorde. L’ambition capricieuse des rois et des ministres n’a pas été plus fatale au repos de l’Europe, que l’impertinente jalousie