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jamais été l’objet d’une réclamation universelle du peuple, comme celle qu’ont occasionnée les Warrants généraux[1] ; pratique sans contredit très-abusive, mais qui pourtant ne peut donner lieu à une oppression générale ; tandis qu’on peut affirmer qu’il n’existe pas en Angleterre un seul pauvre ouvrier, parvenu à l’âge de quarante ans, qui n’ait eu à éprouver, dans un moment ou dans un autre de sa vie, des effets excessivement durs de cette oppressive et absurde loi du domicile[2].

Je terminerai ce long chapitre en observant que s’il a été d’usage anciennement de fixer le taux des salaires, d’abord par des lois générales qui s’étendaient sur la totalité du royaume, et ensuite par des ordonnances particulières des juges de paix pour chaque comté particulier, aujourd’hui ces deux pratiques sont tout à fait tombées en désuétude. « Après une expérience de plus de quatre cents ans, dit le docteur Burn, il est bien temps enfin de ne plus se tourmenter pour assujettir à des règlements précis ce qui, par sa nature, ne paraît être susceptible d’aucune exacte limitation ; car s’il fallait que toutes les personnes reçussent des salaires égaux dans le même genre de travail, il n’y aurait plus d’émulation, et ce serait fermer la voie à l’industrie et au talent. »

  1. Les mandats d’arrêt ou warrants généraux sont ceux qui portent commission d’arrêter en général toutes personnes suspectes d’un tel délit, sans autre désignation de personnes. Ils ont été pratiqués surtout dans les poursuites contre les libelles et autres délits résultant de la presse. Enfin, cette forme a été déclarée illégale en 1766, et tout warrant doit être spécial, à peine de nullité, c’est-à-dire qu’il doit désigner spécialement et nominalement l’individu qu’il s’agit d’arrêter.
  2. On a accusé le docteur Smith d’avoir exagéré les effets pernicieux des lois de domicile, et peut-être ce reproche est-il fondé dans une certaine proportion. Mais malgré les améliorations apportées à ces lois par l’acte de 1795, qui abolit les certificats, et qui défend de renvoyer un pauvre avant qu’il soit devenu à charge à la paroisse, ces lois n’en ont pas moins donné lieu à une immense quantité de litiges. Les sommes dépensées en actions légales concernant les domiciles ou l’expulsion des pauvres, avant les changements opérés dans les lois des pauvres en 1834, furent rarement au-dessous de 300,000 à 350,000 livres sterling par an ! Aussi longtemps qu’existera un système de charité forcée pour l’entretien des pauvres, les paroisses répugneront toujours extrêmement à donner à un pauvre le droit de domicile, et seront toujours disposées à l’empêcher de l’obtenir par tous les moyens.
    Mac Culloch.