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comptons guère par le nombre de guinées que nous la supposons valoir, mais par le nombre de livres.

Je pense que, dans tous les pays, les offres légales de payement ne purent être faites, dans l’origine, que dans la monnaie seulement du métal adopté particulièrement pour signe ou mesure des valeurs. En Angleterre, l’or ne fut pas regardé comme monnaie légale, même longtemps après qu’on y eut frappé des monnaies d’or. Aucune loi ou proclamation publique n’y fixait la proportion entre l’or et l’argent : on laissait au marché à la déterminer. Si un débiteur faisait des offres en or, le créancier avait le droit de les refuser tout à fait, ou bien de les accepter d’après une évaluation de l’or faite à l’amiable entre lui et son débiteur[1]. Le cuivre ne peut être aujourd’hui une monnaie

  1. Selon le feu lord Liverpool, qui a étudié ce sujet avec grand soin (Treatise on Coins, p. 128), ces monnaies d’or eurent cours à certains taux fixés de temps en temps par proclamation royale, et par conséquent elles ont été monnaie légale dès l’époque où l’or commença à être monnayé en Angleterre, en 1257, jusqu’en 1664, époque où la guinée, qui fut alors frappée pour la première fois, et les autres monnaies d’or furent déclarées monnaies de circulation, sans aucune évaluation de la valeur relative de l’or et de l’argent sur le marché. Cette ordonnance fut en vigueur jusqu’en 1717, où le taux ou la valeur d’après laquelle une guinée pouvait être échangée, fut fixé à 21 schellings. Depuis cette époque jusqu’à 1774, les monnaies d’or et d’argent furent également monnaies légales ; mais comme l’or avait été évalué trop haut par rapport à l’argent dans la proportion établie en 1717, presque tous les grands payements furent effectués en or, et les monnaies d’argent de poids intégral étaient exportées aussitôt après leur sortie de la monnaie ; celles-là seules qui étaient usées et altérées restaient dans la circulation. Enfin, en 1516, la valeur de l’argent fut élevée au-dessus de sa juste proportion, comparée à l’or, en frappant 66 schellings au lieu de 62 dans une livre poids de Troy, les quatre schellings additionnels étant retenus comme un seigneuriage ou droit de 6 14/31 pour cent sur le monnayage : mais afin d’empêcher que cette valeur exagérée de l’argent n’expulsât du pays la circulation des monnaies d’or, et que l’argent ne devint ainsi le seul intermédiaire des échanges, on déclara en même temps que l’argent ne serait monnaie légale que pour une somme qui ne dépasserait pas 40 schellings ; et d’un autre côté, pour empêcher que son abondance le fit baisser de valeur, le pouvoir d’émettre de la monnaie d’argent fut placé exclusivement dans les mains du gouvernement. Grâce à ces règlements, l’argent est devenu un agent de circulation tout à fait subordonné, occupant la même place par rapport à l’or, que le cuivre occupe par rapport à lui. L’expérience a démontré que ce système s’opposait parfaitement bien aux inconvénients que l’on voulait prévenir. Mac Culloch.