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fournissent réciproquement à leur industrie. À cette condition, il n’y aurait que peu ou point de commerce entre les parties éloignées du monde. Quelle sorte de marchandise pourrait supporter les frais d’un voyage par terre, de Londres à Calcutta ? ou, en supposant qu’il y en eût d’assez précieuse pour valoir une telle dépense, quelle sûreté y aurait-il à la voiturer à travers les territoires de tant de peuples barbares ? Cependant, ces deux villes entretiennent aujourd’hui entre elles un commerce très-considérable ; et par le marché qu’elles s’ouvrent l’une à l’autre, elles donnent un très-grand encouragement à leur industrie respective.

Puisque le transport par eau offre de si grands avantages, il est donc naturel que les premiers progrès de l’art et de l’industrie se soient montrés partout où cette facilité ouvre le monde entier pour marché au produit de chaque espèce de travail, et ces progrès ne s’étendent que beaucoup plus tard dans les parties intérieures du pays[1]. L’intérieur des terres peut n’avoir pendant longtemps d’autre marché pour la grande partie de ses marchandises, que le pays qui l’environne et qui le sépare des côtes de la mer ou des rivières navigables. Ainsi, l’étendue de son marché doit, pendant longtemps, être en proportion de ce pays et, par conséquent, il ne peut faire de progrès que postérieurement à ceux du pays environnant. Dans nos colonies de l’Amérique septentrionale, les plantations ont suivi constamment les côtes de la mer ou les bords des rivières navigables, et elles se sont rarement étendues à une distance considérable des unes ou des autres.

D’après les témoignages les plus authentiques de l’histoire, il paraît que les nations qui ont été les premières civilisées, sont celles qui ont habité autour des côtes de la Méditerranée. Cette mer, sans comparaison la plus grande de toutes les mers intérieures du globe, n’ayant point de marées et, par conséquent, point d’autres vagues que celles causées par

  1. Ces vérités sont aujourd’hui parfaitement comprises. Sur tous les points du globe, les gouvernements s’efforcent d’améliorer la navigation, soit en perfectionnant le régime des fleuves, soit en creusant des canaux et des ports. La France, l’Angleterre et les États-Unis ont dépensé plusieurs milliards dans ce but depuis un demi-siècle. La seule étude de la canalisation de l’Europe serait un travail immense. Qu’y a-t-il de plus admirable dans le monde que le canal Érié aux États-Unis, celui de Gothie en Suède, et le canal Calédonien en Écosse ? A. B.