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Essayons d'abord de répondre à cette question est-il vrai que l'Inde produise plusieurs millions de balles de coton, et que l'on n'exporte de ce pays qu'une partie de la production ?

Il est évident que cette question en soulève immédiatement une autre; quelle est l'étendue de la fabrication indigène, quelle portion du coton cultivé dans le pays y filet-on et y tisse-t-on ? Or il est naturellement impossible de donner une réponse précise sur ce point, mais il se présente un moyen très-simple d'en faire une estimation approximative. La quantité de marchandises de coton anglaises, consommée dans ce pays, est connue; quelle quantité de marchandises indigènes consomme-t-on en comparaison ?

L'auteur peut assurer, d'après l'examen qu'il a fait personnellement, que la plus grande partie des habillements portés par les indigènes est de fabrique anglaise ou tout au moins filée en Angleterre; il est parfaitement admis, par la plupart des personnes versées dans le commerce de l'Inde, que le long des grandes voies de communication fréquentées par le commerce et dans les villes les plus peuplées de l'intérieur on vend beaucoup plus de marchandises anglaises que de marchandises indigènes. Cette coutume s'étend tous les ans et, même indépendamment de la crise cotonnière, la fabrication indigène sera peu à peu supplantée par les marchandises étrangères. Il est vraiment surprenant que la fabrication indigène se soit si bien et si longtemps maintenue. On s'étonne, en considérant la méthode maladroite et laborieuse de fabrication employée par les naturels du pays, que leur industrie existe encore. On file encore le coton ainsi qu'on le faisait il y a deux mille ans. A l'exception d'une demi-douzaine de filatures installées à Bombay ou dans les environs, ce travail se fait encore au moyen de l'ancien rouet tourné par une femme, ainsi qu'il était d'usage en Angleterre avant l'invention des machines. Par ce moyen on file en un jour quelques onces (1 once vaut environ 3 grammes) de gros fil de coton, et cette coutume subsiste parce que, dans l'intérieur, loin des routes fréquentées par le