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L’ÉCRIN DISPARU

Et regardant son épouse s’éloigner, puis disparaître derrière un massif de verdure, ces paroles qu’elle avait dites, reviennent à l’esprit de Léo :

« Je ne sais pas : mais il y a en toi quelque chose que j’ignore. »

Ses traits, alors, s’assombrirent de nouveau, et il retomba dans sa morne et coutumière mélancolie…


XVI

ESPOIRS DÉÇUS.


L’élévation de fortune avait peu modifié les habitudes antérieures de la famille Giraldi ; leurs relations étaient peu nombreuses et tout à fait étrangères aux mille futilités de la vie mondaine, qui ne sont trop souvent que les passe-temps conventionnels de gens oisifs et ennuyés.

L’ardent travailleur qu’avait toujours été Léo Giraldi, préférait à tous autres délassements, l’entretien de son jardin, les promenades en famille, spécialement sa tournée favorite en automobile, en côtoyant les rives qui enserrent d’un lien liquide la grande île où s’étale l’immense Métropole Canadienne.

Aussi, de la foule des amis qui s’était présentée au lendemain des jours heureux, quatre ou cinq familles seulement qui se firent les auxiliaires des pieuses libéralités de Madame Giraldi continuèrent à fréquenter son salon. Les autres craignant d’y rencontrer plus de pauvres haillons que de robes de soie, s’en étaient vengés en disant que les « GIRALDI » étaient restés « peuple » ce qui faisait sourire dédaigneusement ces intimes de circonstance.

Ami de vieille date, l’Aumônier de Notre-Dame de Pitié ainsi qu’un autre ecclésiastique de ses connaissances, avait ses entrées libres dans la maison de monsieur Giraldi. Le digne Prêtre connaissait la tiédeur de Léo au point de vue religieux, et dans le fond de son âme, la déplorait. Mais sur les questions morales et sociales, le clergé trouvait en lui un auxiliaire dévoué. Jamais on ne faisait en vain appel à sa collaboration.

Par son caractère, comme par ses idées, il semblait prédestiné à revenir à la pratique de cette foi, qu’il avait pu oublier mais n’avait jamais reniée ; plus d’une fois par jour, sans doute la pensée de convertir son ami, revenait sur les lèvres du saint prêtre durant ses longues oraisons.