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fils d’AIi. Celui-ci cependant, complètement battu en l’année 137 par les armées de Mansour, que commandoit Abou-Moslem, s’enfuit et se retira dans l’Irak, auprès de ses deux frères, Soleïman et Isa, dont le premier étoit gouverneur des provinces de Basra, Bahraïn et Oman, et le second gouvernoit la province d’Ahwaz. Soleïman et Isa sollicitèrent et obtinrent de Mansour la grâce de leur frère Abd-allah, et, s’étant chargés de rédiger l’acte d’amnistie que Mansour avoit consenti à lui accorder, ils vinrent pour cela à Basra, et confièrent la rédaction de cet acte à Abd-allah, fils d’Almokaffa, qui étoit secrétaire d’Isa, et qui passoit pour être très-habile dans la rédaction des actes contenant des stipulations ou engagemens réciproques. La manière dont Abd-allah s’acquitta de cette commission choqua Mansour, qui peut-être nourrissoit secrètement le projet de sacrifier, quand il en trouveroit l’occasion, son oncle Abd-allah, fils d’AIi, ce qu’il exécuta effectivement en l’année 139. Informé que l’acte d’amnistie avoit été rédigé par Abdallah, fils d’Almokaffa, il envoya un ordre secret à Sofyan, fils de Moawia, gouverneur de la ville de Basra, de faire mourir le fils d’Almokaffa. Cet ordre ne pouvoit venir plus à propos pour Sofyan, qui avoit été très-souvent l’objet des railleries et des sarcasmes les plus piquans d’Abd-allah, fils d’AImokaffa, et qui avoit juré d’en tirer vengeance. Abd-allah s’étant présenté chez Sofyan, pour s’acquitter d’une mission dont l’avoit chargé Isa, fils d’AIi, Sofyan profita de cette occasion pour satisfaire sa vengeance et celle de Mansour ; il fit prendre Abd-allah, puis ayant fait chauffer un four, il fit couper l’un après l’autre et jeter dans le four les membres de ce malheureux. Enfin, il y fit jeter tout son corps et fit fermer le four sur lui, en disant : Je n’ai encouru aucun blâme en faisant de toi un exemple, parce que tu es un impie, qui as corrompu les hommes. Il faisoit allusion aux soupçons d’athéisme, ou du moins de magisme, dont Abd-allah étoit assez généralement l’objet.

La mort d’Abd-allah, fils d’Almokaffa, ne pouvoit demeurer secrète. Ses protecteurs Soleïman et Isa, oncles de Mansour, informés qu’on l’avoit vu entrer dans la maison de Sofyan, et qu’il