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nulle part. Buzurdjmihr n’eut d’autre part à ce recueil, si nous en croyons le Schah-namèh et ce que nous lisons dans les prolégomènes mêmes du livre de Calila, que d’ajouter, à la tête de l’ouvrage, un chapitre où Barzouyèh est censé parler lui-même[1] ; et rendre compte de sa naissance, de son éducation et de sa vie, jusqu’à l’époque de son voyage dans l’Inde. Suivant les traditions conservées dans le Schah-namèh, Barzouyèh, au lieu d’accepter les présens et les faveurs dont vouloit le combler Nouschiréwan ; demanda pour toute récompense que Buzurdjmihr fût chargé par le monarque de rédiger ce chapitre, et qü’on le plaçât à la tête du livre de Calila. Il voulut s’assurer l’immortalité, en attachant ainsi son nom à celui du prince et de son illustre ministre, et sur-tout à un livre qui lui paroissoit devoir se transmettre à la postérité la plus reculée. Ne semble-t-il pas entendre Aman prescrire à Assuérus le traitement dû à celui que le roi veut honorer, et exiger que le premier ministre devienne l’instrument de son triomphe ?

Quoique j’adopte, pour le fond, les traditions consignées dans les prolégomènes du livre de Calila et dans le Schah-nameh, sur le voyage et les travaux de Barzouyèh, je ne prétends point qu’on doive ajouter foi à tous les détails. Il est possible que le voyage de Barzouyèh dans l’Inde n’ait point été fait par l’ordre de Nouschiréwan, et dans la seule vue de chercher à se procurer un livre dont la renommée étoit venue jusqu’en Perse ; et si quelqu’un croit devoir révoquer en doute ces circonstances, bien que je ne voie aucune bonne raison de les nier, je les abandonne volontiers au jugement des lecteurs. Il n’en est pas de même du fond du récit ; il me paraît impossible de ne pas l’admettre.

La traduction Pehlvie du livre de Calila a eu le sort de tout ce qui constituoit la littérature Persane, au temps de la dynastie

  1. C’est ce que dit aussi l’auteur du مخعل النوارڃ. Il s’exprime ainsi, sous le règne de Nouschiréwan : ازيــن بِــس فرستادن برورى طبيب نود نه هندوستان تا آخا عاند عدّتها وثير ڪشت وجيلت ڪايله ودمْنه ناتران آورد ثيس ساه ودَر برزوى بزر جمهر دران فزود نه فرمان شآه نا رحج او ضايع نكردد وذڪى عانـدش درمالم . Man. Pers. de la bibl. du Roi, n° 62.