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V


LE seul qui monte aux cieux est le bruit lent des flots,
Quand la Nuit à leur voix ouvre ses grands silences
Et, comme le sang perle à la cime des lances,
Égrène, dans l’air froid, leurs rythmiques sanglots.

Ainsi que le plongeur qui garde en son oreille
Le retentissement cadencé de la mer,
J’ai gardé sous mon front et dans mon cœur amer
Une voix obstinée, au bruit des flots pareille,

Qui berce ma douleur comme en un lit profond
Et sur mes désespoirs passe comme une larme,
Sa voix, sa voix qui pleure et qui ment et qui charme
Et qui feint de guérir le mal que ses yeux font.

La Nuit est sans pitié qui m’apporte ce leurre
D’entendre encor sa voix comme un chuchotement,
Sa chère voix qui charme et qui pleure et qui ment,
Sa douce voix qui ment et qui charme et qui pleure !