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DE PERCY BYSSHE SHELLEY

et sans la seconde, la première est un terrible fléau pour vous-même et pour autrui.

Je vous ai dit ce que je pense à ce sujet, parce que je veux produire en vos esprits la crainte et la prudence nécessaires, avant que puisse être réalisé l’heureux état dont j’ai parlé. Cette réserve méticuleuse est très différente de la crainte inspirée par la prudence qui vous conduirait à songer tout d’abord à vous-mêmes, tandis que l’autre sentiment est plein de cet amour ardent, brûlant pour autrui, qui brûle dans vos cœurs, ô Irlandais, et auquel j’ai, en une chère espérance, compté allumer une flamme capable d’éclairer et de régénérer le monde.

J’ai dit que le riche commande et que le pauvre obéit, et que l’argent n’est qu’une sorte de signe montrant que selon le gouvernement, le riche a un droit de commander au pauvre ou plutôt que le pauvre, faute d’argent pour se procurer du pain, est forcé de travailler pour le riche, ce qui revient au même. J’ai dit que je trouve cela très mal, et que je voudrais voir toutes ces relations modifiées. J’ai dit aussi que nous ne devons guère attendre d’amélioration en notre temps, et que nous devons nous contenter de poser les fondations de la liberté et du bonheur par la vertu et la sagesse.

Telle sera donc ma tâche, ô Irlandais ; maintenant que celle-ci soit la vôtre : cette gloire que je suis anxieux de vous voir mériter, elle ne vous fera jamais défaut, cette gloire d’enseigner à un monde les premières leçons de vertu et de sagesse.

Que les pauvres continuent encore à travailler !