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DE PERCY BYSSHE SHELLEY

et cruel. Des hommes malintentionnés surgiront qui voudront vous empêcher de penser à votre guise, — qui vous brûleront si vous ne pensez pas comme eux. Il y a toujours des scélérats pour mettre à profit les temps de malheur. Les moines et les prêtres de jadis étaient de bien méchants hommes, prenez garde que de telles gens n’abusent encore de votre confiance.

Vous ne vous abusez pas sur votre situation actuelle, vous êtes traités outrageusement, vous êtes cruellement menés.

Cet esclavage prendra fin, j’oserai le prédire. Vos ennemis n’auront pas l’audace de vous persécuter plus longtemps ; le ressort de l’Irlande est comprimé, mais non brisé, et cela ils le savent fort bien. Mais je désire que vos regards embrassent un horizon plus vaste, je désire que vous songiez à vos enfants, aux enfants de vos enfants, que vous fassiez en sorte (car tout cela dépend de vous) de ne pas laisser surgir une tyrannie plus terrible, plus cruelle quand vous venez d’en détruire une.

Défiez-vous de ces imposteurs à la figure lisse, qui, il est vrai, parlent de liberté, mais par leurs tromperies vous conduisent à l’esclavage.

Peut-il exister un pire esclavage que de faire dépendre de la volonté d’un autre homme le salut de son âme. Un homme est-il plus qu’un autre, est-il plus qu’un autre favorisé de Dieu ? Non, certes : tous sont favorisés de lui en proportion du bien qu’ils font, et non point en égard au rang qu’ils occupent et à leur profession. Dieu fait autant de cas d’un pauvre homme que d’un prêtre, et lui