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Qui, dissipant l’illusion,
Rend leur vue, à nos yeux, normale et coutumière ;
Si bien que, s’éveillant tous deux à la lumière,
Ils traiteront ceci comme une vision,
Et, dans un bon accord que plus rien ne dissout,
Retourneront chez eux, bras dessus, bras dessous !…
Va donc ! De mon côté j’obtiendrai de la reine
Qu’elle me cède enfin le petit prince hindou ;
Puis je dissiperai sans peine
L’amour monstrueux qui l’enchaîne,
Et la paix régnera partout !

PUCK

Mon féerique seigneur, il ne faut pas qu’on traîne !
Les dragons de la nuit emportent les nuages,
Et, là-bas, l’orient qui s’éclaire, présage
Une aurore prochaine !
Déjà, pressentant son retour,
Les fantômes errants gagnent leurs cimetières,
Et les damnés, les malheureux
Qui reposent aux carrefours,
Les noyés, tous les morts sans bières,
Vont rentrer dans leur lit véreux.
Ils craignent que le jour
Baigne de sa clarté leurs fautes et leurs taches
Et préfèrent s’unir à la nuit qui les cache !

OBÉRON

Mais nous ne sommes pas de ces esprits glacés
Que le jour évapore !
Il m’est arrivé de chasser
Avec l’amoureux de l’aurore !
Dans les bois, au gré des sentiers,
J’ai couru comme un forestier,