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Cassius. — Titinius, si tu m’aimes, monte sur mon cheval, et enfonce tes éperons dans ses flancs jusqu’à ce qu’il t’ait conduit vers ces troupes là-bas et qu’il t’ait ramené, afin que je puisse savoir si ces troupes là-bas sont amies ou ennemies.

Titinius. — Je serai de retour en un clin d’œil. (Il sort.)

Cassius. — Va, Pindarus, monté plus haut sur cette colline ; j’ai toujours eu la vue basse ; observe Titinius, et dis-moi ce que tu remarques sur le champ de bataille. (Sort Pindarus.) C’est en ce jour que je respirai pour la première fois : le temps a marché en cercle, et je finirai au point même ou j’ai commencé ; ma vie a terminé sa course. Maraud, quelles nouvelles ?

Pindarus, d’en haut. — Oh, Seigneur !

Cassius. — Quelles nouvelles ?

Pindarus, d’en haut. — Titinius est entouré de toutes parts de cavaliers qui lui courent sus à force d’éperons ; cependant il tient encore la tête. — Maintenant, ils sont presque sur lui ; — courage, Titinius ! — Maintenant quelques-uns mettent pied à terre ; — ah ! il met pied à terre aussi : — il est pris — (acclamations) ; et écoutez ! ils crient de joie.

Cassius. — Descends, ne regarde pas davantage. Oh ! lâche que je suis d’avoir vécu si longtemps pour voir mon meilleur ami pris devant ma face ! (Pindarus descend.) Viens ici, maraud : je te fis prisonnier dans le pays des Parthes, et lorsque j’épargnai ta vie, je te fis prêter le serment que tout ce que je te commanderais tu essayerais de l’exécuter. Eh bien, à cette heure tiens ton serment ; sois maintenant un homme libre, et avec cette bonne épée qui traversa les entrailles de César, perce ce sein. Ne t’arrête pas à me répondre : ici, prends la poignée ; et dès que j’aurai couvert mon visage, — il l’est maintenant — dirige le fer. — César, tu es vengé par l’épée même qui te tua. (Il meurt.)

Pindarus. — Ainsi, je suis libre ; cependant je n’aurais pas voulu le devenir de la sorte, si j’avais pu faire ma volonté. Ô Cassius ! Pindarus va s’enfuir loin de cette con-