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pas pour toi un motif de m’aimer ; mais enchaîne plutôt ta raison par ce raisonnement : l’amour qu’on cherche est bon, mais celui qui est donné sans qu’on l’ait cherché est meilleur encore.

Viola. — Sur l’innocence et sur ma jeunesse, je le jure, je n’ai qu’un cœur, une âme, une foi, et nulle femme ne les possède, ni n’en sera jamais maîtresse, sauf moi seul. Maintenant adieu, bonne Madame ; jamais plus je ne viendrai déplorer devant vous les larmes de mon maître.

Olivia. — Reviens cependant ; car toi peut-être tu pourras émouvoir ce cœur qui maintenant abhorre de prendre en gré son amour ; (Elles sortent.)


Scène II

Un appartement dans la demeure d’Olivia.
Entrent Messire TOBIE BELCHI, Messire ANDRÉ AGUECHEEK et FABIEN.

Messire André. — Non ma foi, je ne resterai pas une minute de plus.

Messire Tobie. — Ta raison, mon cher poison, donne ta raison.

Fabien. — 11 faut absolument que vous donniez votre raison, Messire André.

Messire André. — Pardi, j’ai vu votre nièce faire plus de courtoisies au serviteur du duc qu’elle ne m’en a jamais accordé, j’ai vu cela dans le jardin.

Messire Tobie. — T’a-t-elle vu pendant ce temps là, vieux bambin ? dis-moi cela.

Messire André. — Aussi clairement que je vous vois à présent.

Fabien. — C’était une grande preuve de son amour qu’elle vous donnait là.

Messire André. — Malpeste ! voulez-vous faire de moi un âne ?