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LE SOIR DES ROIS ou CE QUE VOUS VOUDREZ.

malvolio.

— Vous-même, madame. Jetez les yeux sur cette lettre, je vous prie. — Vous ne pouvez pas nier que ce ne soit là votre écriture ; — ayez une autre écriture, un autre style, si vous pouvez ! — Ou encore dites que ce n’est pas votre cachet, votre tour. — Vous ne pouvez contester rien de tout ça. Eh bien, convenez-en donc ; — et expliquez-moi, dans toute la mesure de l’honneur, — pourquoi vous m’avez donné des marques de faveur aussi éclatantes, — en me disant de venir à vous le sourire aux lèvres, les jarretières en croix, — de mettre des bas jaunes et de regarder de haut — sir Tobie et les gens subalternes. — Puis, quand j’ai obéi dans un déférent espoir, — pourquoi avez-vous permis que je fusse emprisonné, — enfermé dans une chambre noire, visité par un prêtre, — et que je devinsse le plastron le plus ridicule — que jamais mystification ait joué ? Expliquez-moi pourquoi.

olivia.

— Hélas ! Malvolio, cette écriture n’est pas la mienne, — bien que, je le confesse, elle lui ressemble beaucoup ; — mais sans nul doute c’est la main de Maria. — Et, je me rappelle maintenant, c’est elle — qui tout d’abord m’a dit que tu étais fou ; et alors tu es arrivé tout souriant, — et avec toutes les allures qui t’étaient prescrites — dans la lettre. Je t’en prie, calme-toi ; — c’est un tour des plus malicieux qu’on t’a joué là ; — mais, quand nous en connaîtrons les motifs et les auteurs, — je veux que tu sois juge et partie — dans ta propre cause.

fabien.

Bonne dame, veuillez m’écouter ; — et ne permettez pas qu’aucune querelle, aucune dispute ultérieure — trouble cette heure propice — dont je suis émerveillé. Dans cet espoir, — j’avouerai très-franchement que c’est moi-même et Tobie — qui avons imaginé ce complot con-