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SCÈNE III.

suffolk.

— Et le plus puissant d’entre eux — n’est pas plus puissant en Angleterre que les Nevils : — Salisbury et Warwick ne sont pas de simples pairs.

marguerite.

— Tous ces lords réunis ne me blessent pas à beaucoup près autant — que cette arrogante, la femme du lord protecteur. — Elle balaie la cour avec un cortége de dames, — plutôt comme une impératrice que comme la femme du duc Homphroy. — Les étrangers la prennent pour la reine. — Elle porte les revenus d’un duché sur son dos, — et dans son cœur elle insulte à notre pauvreté. — Est-ce que je ne vivrai pas assez pour être vengée d’elle ? — Méprisante et vile créature ! La caillette — se vantait l’autre jour, au milieu de ses mignons, — que la queue de sa plus mauvaise robe — valait plus que tous les domaines de mon père, — avant que Suffolk lui eût donné deux duchés pour sa fille.

suffolk.

— Madame, j’ai moi-même pour elle englué certain buisson, — et j’y ai placé un chœur d’oiseaux séducteurs, — en sorte qu’elle s’y abatte pour écouter leur chant, — et ne reprenne plus cet essor qui vous trouble. — Ainsi, ne vous occupez plus d’elle, et écoutez-moi, madame ; — car je prends la liberté de vous donner un conseil. — Quoique nous n’aimions pas le cardinal, — il faut nous liguer avec lui et avec les lords — jusqu’à ce que nous ayons fait tomber le duc Homphroy en disgrâce. — Quant au duc d’York, la plainte qui vient d’être portée — ne lui fera pas grand bien. — Ainsi, nous les extirperons tous l’un après l’autre, — et vous tiendrez seule enfin l’heureux gouvernail.