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EXTRAIT DES MÉMOIRES DE CAVENDISH.

pondre davantage, bien décidée à ne plus paraître devant aucune autre cour. Le roi, remarquant qu’elle était partie de la sorte, et se remettant en mémoire les lamentables paroles qu’elle avait prononcées devant lui et toute l’audience, s’exprima ainsi :

— Puisque la reine est partie, je veux, en son absence, déclarer devant vous tous, lords ici assemblés, qu’elle a été pour moi une épouse aussi fidèle, aussi obéissante, aussi soumise que je pouvais le souhaiter ou le désirer dans ma fantaisie. Elle a toutes les vertueuses qualités qui doivent être dans une femme de sa dignité ou dans toute autre de moindre condition. Certainement elle est née noble femme : ses mérites seuls suffiraient à le prouver.

Sur ce milord cardinal dit :

— Sire, je supplie humblement Votre Altesse de déclarer, devant tout cet auditoire, si j’ai été le principal instigateur ou le premier moteur de cette affaire auprès de Votre Majesté ; car c’est ce dont tout le monde me soupçonne grandement.

— Ma foi, dit le roi, vous vous êtes bien plutôt opposé à ce que je la soulevasse ou la misse en avant. Et, pour lever tous les doutes, je vais vous déclarer la cause spéciale qui m’a déterminé à agir ainsi : ce fut un certain scrupule qui piqua au vif ma conscience, à la suite de certaines paroles que dit dans une certaine circonstance l’évêque de Bayonne, ambassadeur du roi de France, après une longue discussion sur la conclusion d’un mariage projeté entre notre fille la princesse Mary et le duc d’Orléans, second fils du roi de France. Avant de prendre une résolution à ce sujet, l’évêque demanda un répit afin de consulter le roi son maître sur la question de savoir si notre fille Mary était légitime, en raison du mariage qui avait été conclu autrefois entre la reine actuelle