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II° ET III° PARTIE DE HENRY VI. — HENRY VIII.

seconde bataille de Saint-Albans, qui fut livrée le 17 février 1461, en combattant du côté du roi Henry. Et, loin d’avoir été confisqués par le parti vainqueur (celui de la reine Marguerite), ses biens furent en réalité saisis par le personnage même qui parle en ce moment (Édouard IV), après la grande victoire de Towton. Shakespeare, en remaniant cette pièce, a adopté implicitement l’assertion erronée de l’auteur original, car ces cinq vers se retrouvent presque textuellement dans la vieille pièce. Mais, plus tard, en écrivant Richard III, il a rétabli la vérité d’après le témoignage des chroniques. À la scène III de ce drame, Richard, s’adressant à la reine Élisabeth, lui dit : « Pendant tout ce temps-là, vous conspiriez pour la maison de Lancastre… Votre mari n’a-t-il pas été tué du côté de Marguerite à Saint-Albans ? Laissez-moi vous remettre en mémoire, si vous l’oubliez, ce que vous étiez alors. »

» Ceci est une des nombreuses circonstances qui prouvent incontestablement que Shakespeare n’est pas l’auteur original de la seconde et de la troisième partie de Henry VI. » — Malone.

(46) « Durant le temps que le comte de Warwick était ainsi à négocier un mariage pour le roi Édouard, le roi, étant à la chasse dans la forêt de Wichwood, au delà de Stoney Stratford, s’arrêta pour son agrément au manoir de Grafton, où résidait la duchesse de Bedford, mariée à sir Richard Woodville, lord Rivers. La duchesse avait alors près d’elle une de ses filles, appelée dame Élisabeth Grey, veuve de sir John Grey, chevalier, tué à la dernière bataille de Saint-Albans par les soldats du roi Édouard. Cette veuve, ayant une requête à présenter au roi, pour obtenir soit la restitution d’un bien qui lui avait été pris, soit la grâce d’une augmentation de fortune, trouva faveur auprès du roi, qui non-seulement lui accorda sa requête, mais prit en grand goût sa personne… Quand le roi eut bien remarqué tous ses traits et son maintien décent et réservé, il commença par essayer de la déterminer à devenir sa maîtresse, lui promettant maints présents et de belles récompenses ; lui déclarant en outre que, si elle y consentait, elle pourrait, de sa concubine, devenir sa femme et sa compagne de lit légitime. Dame Élisabeth repoussa sagement et discrètement cette demande, affirmant que, trop humble pour être l’épouse d’un si noble personnage, elle était, dans sa pauvre honnêteté, trop vertueuse pour être ou sa concubine ou sa maîtresse. Le roi, qui n’était jusque-là que légèrement échauffé par