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CORIOLAN ET LE ROI LEAR.

l’officier.

— Pas de larmes, ma bonne dame ! pas d’argument contre l’or et l’avancement ! — Allons, mes maîtres, préparez vos cordes.

cordelia, au capitaine.

— C’est vous, monsieur, que j’adjure ! — Vous avez une forme humaine ; et, si les prières ne peuvent obtenir — de votre âme touchée que vous épargniez la vie d’un pauvre roi, — par ce que vous avez de plus cher au monde, — je vous supplie de me dépêcher la première.

le capitaine.

— Déférez à sa requête ! Dépêchez-la la première.

lear.

— Arrière, limiers d’enfer ! De par les dieux, je vous ordonne de l’épargner. — C’est ma Cordélia, ma fille fidèle et pieuse. — Vous êtes sans pitié ?… Eh bien, subissez donc la vengeance d’un vieillard.

Le roi Lear arrache l’épée d’un officier et abat les deux soldats qui avaient saisi Cordélia.


Entrent Edgar, le duc d’Albany et les chevaliers du roi Lear.
edgar.

— Mort ! enfer ! vautours, retenez vos mains impies, — ou recevez la mort avant de la donner.

albany.

— Gardes, arrêtez ces instruments de cruauté.

cordelia.

— Oh ! mon Edgar !

edgar.

— Ma Cordélia bien-aimée ! Heureuse a été la minute — de notre arrivée. Les dieux ont pesé nos souffrances. — Nous avons traversé la flamme, et maintenant un bonheur éternel luit pour nous.

le chevalier.

— Regardez, milord ! Voyez ! le généreux roi — a tué deux d’entre eux.

lear.

— N’est-ce pas, camarade ? — J’ai vu le temps où avec ma bonne épée mordante — je les aurais fait tous sauter. Je suis vieux maintenant, — et ces vils tracas me ruinent… Hors d’haleine ! — Ô honte ! je suis tout hors d’haleine et tout épuisé.

albany.

— Amenez le vieux Kent.

Sort un chevalier.