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NOTES.

asile et secours ; — elle me prodigua les mots les plus aimables et les plus courtois, — mais elle se montra plus cruelle dans ses actions — que jamais fille ne s’était montrée. — Elle me pria d’aller un matin de bonne heure — dans un bosquet situé à deux milles de la cour, — en me disant qu’elle viendrait m’y parler ; — là elle avait aposté un misérable assassin tout velu — pour nous massacrer, mon fidèle ami et moi. — Jugez donc vous-même, quelque court que soit mon récit, — si jamais homme eut plus grand sujet de chagrin.

le roi de gaule.

— Jamais pareille impiété ne fut commise — depuis la création du monde.

leir.

— Et aujourd’hui je suis réduit à implorer le secours de celle envers qui j’ai été si dur. — Si son arrêt m’infligeait la mort, — je dois le confesser, elle me payerait seulement ce qui m’est dû. — Mais si elle me montre la sollicitude d’une fille aimante, — c’est Dieu, c’est son cœur qu’elle consultera, non mon propre mérite.

cordella.

— Elle le fera, n’en doutez pas ; j’ose jurer qu’elle le fera.

leir.

— Comment savez-vous cela, ne sachant pas ce qu’elle est ?

cordella.

— J’ai moi-même bien loin d’ici un père — qui m’a traité aussi durement que vous l’avez traitée ; — cependant, pour voir encore une fois sa face vénérable, — je me prosternerais et j’irais au-devant de lui à genoux.

leir.

— Oh ! il n’y a d’enfants impitoyables que les miens !

cordella.

— Ne les condamnez pas tous, pour le crime de quelques-uns. — Mais vois, cher père, vois, regarde et reconnais ta fille toute dévouée qui te parle.

Elle s’agenouille.
leir.

— Oh ! reste debout ! c’est à moi de tomber à genoux — et d’implorer le pardon de mes fautes passées.

Il s’agenouille.
cordella.

— Oh ! si vous souhaitez que je respire, — levez-vous, cher père, ou je reçois le coup de mort.