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SCÈNE IV.

gne à ton fou à mentir ; je voudrais bien apprendre à mentir.

lear.

Si vous mentez, coquin, vous serez fouetté.

le fou.

Quelle merveilleuse parenté peut-il y avoir entre toi et tes filles ? Elles veulent me faire fouetter si je dis vrai ; toi, tu veux me faire fouetter si je mens, et parfois je suis fouetté si je garde le silence. J’aimerais mieux être n’importe quoi que fou, et pourtant je ne voudrais pas être toi, m’n oncle : tu as épluché ton bon sens des deux côtés et tu n’as rien laissé au milieu. Voici venir une des épluchures.


Entre Goneril.
lear.

Eh bien ! ma fille, pourquoi ce sombre diadème ? Il me semble que depuis peu vous avez le front bien boudeur.

le fou.

Tu étais un joli gaillard quand tu n’avais pas à t’inquiéter de sa bouderie ; maintenant tu es un zéro sans valeur ; je suis plus que toi maintenant ; je suis un fou, tu n’es rien.

À Goneril.

Oui, morbleu ! je vais retenir ma langue : votre visage me l’ordonne, quoique vous ne disiez rien… Chut ! chut !

Qui ne garde ni mie ni croûte,
Par dégoût de tout s’expose au besoin.

Montrant Lear.

Voici une cosse vide.

goneril, à Lear.

— Monsieur, ce n’est pas seulement votre fou qui a toute licence ; — les autres gens de votre suite insolente — récriminent et querellent à toute heure, se portant — à des excès ignobles et intolérables. Monsieur, — j’avais cru, en