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CORIOLAN.

monsieur… se montrer, comme on dit, ses amis, tant qu’il était en déconfiture.

premier serviteur.

En déconfiture ! Comment ça ?

troisième serviteur.

Mais quand ils verront reparaître le cimier de ce héros pur sang, ils sortiront de leurs terriers comme des lapins après la pluie, et tous se mettront en danse avec lui.

premier serviteur.

Mais quand cela aura-t-il lieu ?

troisième serviteur.

Demain, aujourd’hui, immédiatement. Vous entendrez battre le tambour cette après-midi. La chose est pour ainsi dire dans le menu de leur festin et doit être exécutée avant qu’ils se soient essuyé les lèvres.

deuxième serviteur.

Bon ! nous allons donc revoir le monde en émoi ! La paix n’est bonne qu’à rouiller le fer, à multiplier les tailleurs et à faire pulluler les faiseurs de ballades.

premier serviteur.

Donnez-moi la guerre, vous dis-je ! Elle l’emporte sur la paix autant que le jour sur la nuit ; elle est leste, vigilante, sonore et pleine de nouveautés. La paix, c’est une apoplexie, une léthargie ; elle est fade, sourde, somnolente, insensible ; elle fait bien plus de bâtards que la guerre ne détruit d’hommes.

deuxième serviteur.

C’est juste ; et si le viol peut s’appeler, en quelque sorte, un acte de guerre, on ne peut nier que la paix ne fasse bien des cocus.

premier serviteur.

Oui, et elle rend les hommes ennemis les uns des autres.