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SCÈNE XVIII.

est écrit dans les lois de Venise — que, s’il est prouvé qu’un étranger, — par des manœuvres directes ou indirectes, — attente à la vie d’un citoyen, — la personne menacée — saisira la moitié des biens du coupable ; l’autre moitié — rentrera dans la caisse spéciale de l’État ; — et la vie de l’offenseur sera livrée à la merci — du doge qui aura voix souveraine. — Or, je dis que tu te trouves dans le cas prévu, — car il est établi par preuve manifeste — qu’indirectement et même directement — tu as attenté à la vie même — du défendant ; et tu as encouru — la peine que je viens de mentionner. — À genoux, donc, et implore la merci du doge.

gratiano.

— Implore la permission de t’aller pendre. — Mais, tes biens faisant retour à l’État, tu n’as plus de quoi acheter une corde ; — il faut donc que tu sois pendu aux frais de l’État.

le doge.

— Pour que tu voies combien nos sentiments diffèrent, — je te fais grâce de la vie avant que tu l’aies demandée. — La moitié de ta fortune est à Antonio, — l’autre moitié revient à l’État ; — mais ton repentir peut encore commuer la confiscation en une amende.

portia.

— Soit, pour la part de l’État ; non, pour celle d’Antonio.

shylock.

— Eh ! prenez ma vie et tout, ne me faites grâce de rien. — Vous m’enlevez ma maison en m’enlevant — ce qui soutient ma maison ; vous m’ôtez la vie — en m’ôtant les ressources dont je vis.

portia.

— Que lui accorde votre pitié, Antonio ?