Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1872, tome 15.djvu/295

Cette page a été validée par deux contributeurs.
295
LES PLAINTES D’UNE AMOUREUSE.

mêmes cherchée, et j’ai d’autant moins de remords qu’elles ont plus part à ma faute.

XXVIII

» Parmi tant de femmes que j’ai vues, il n’en est aucune dont la flamme ait embrasé ainsi mon cœur, aucune qui ait apporté le moindre trouble à mon humeur, ou qui ait jamais charmé mes loisirs ; je leur ai fait du mal, mais elles ne m’en ont jamais fait ; j’ai mis ma livrée à leurs cœurs, mais le mien est resté libre et est toujours le maître souverain de son empire.

XXIX

» Voyez ces perles pâles et ces rubis rouges comme du sang, tributs que m’ont envoyés leurs caprices blessés : dans ce symbole des émotions que je leur causais à la fois, leur anxiété était peinte sous le blanc livide, et leur confusion sous les nuances cramoisies, — effets de la crainte et de la tendre pudeur qui, campées dans leurs cœurs, luttaient sur leurs physionomies.

XXX

» Et, tenez, examinez ces bijoux où des mèches de cheveux sont amoureusement tressées avec un lacet d’or ; je les ai reçus de plusieurs beautés qui m’ont supplié en pleurant de daigner les accepter, — tout enrichis de pierres précieuses dont la rareté, le prix et les vertus étaient exposés dans des sonnets profonds.