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LE VIOL DE LUCRÈCE

I

Emporté loin d’Ardée, la ville assiégée, par les ailes traîtresses d’un coupable désir, ne respirant plus que la luxure, Tarquin quitte l’armée romaine et porte à Collatium le feu sombre qui couve sous de pâles cendres pour éclater bientôt et étreindre d’une ceinture de flammes la taille de la bien-aimée de Collatin, Lucrèce la chaste.

II

Malheureusement peut-être c’est ce titre de chaste qui a aiguisé cet impérieux appétit, alors que Collatin a commis l’imprudence de vanter l’incomparable incarnat et l’éblouissante blancheur qui brillent dans ce firmament de délices, où des globes mortels, aussi lumineux que les splendeurs célestes, gardent pour lui seul leur pur rayonnement.

III

Car la nuit précédente, dans la tente de Tarquin, Collatin lui-même a dévoilé le trésor de son bonheur ; il a dit quelle inappréciable richesse les cieux lui ont accordée dans la possession de sa belle compagne ; estimant