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VÉNUS ET ADONIS.

compatissant et trop sévère, d’autant plus trompeur qu’il semblera plus sincère. Il sera pervers quand il aura l’air le plus empressé ; il inspirera la peur au vaillant, le courage au couard.

CXCIV

» Il sera la cause de guerres et de terribles événements ; il mettra la dissension entre le fils et le père ; il sera assujetti, asservi à tous les mécomptes, comme le combustible à la flamme. Puisque la mort a détruit mon amour dans son printemps, ceux qui aimeront le mieux ne jouiront pas de leur amour. »

CXCV

À ce moment l’enfant, qui était étendu mort auprès d’elle, s’évanouit à sa vue comme une vapeur, et dans son sang répandu à terre éclôt une fleur pourpre tachetée de blanc, imitant bien ses joues pâles et le sang qui ressortait en rondes gouttes sur leur blancheur.

CXCVI

Vénus penche la tête pour sentir la fleur fraîche éclose, et la compare à l’haleine d’Adonis : elle dit qu’elle gardera cette fleur dans son sein, puisqu’Adonis lui-même lui a été enlevé par la mort ; elle cueille la tige, et par la cassure jaillit une sève verdâtre qu’elle compare à des larmes.

CXCVII

« C’était là, s’écrie-t-elle, l’habitude de ton père, pauvre fleur, suave rejeton d’un être plus suave encore ; ses