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VÉNUS ET ADONIS.

XCIX

« Le sanglier ! » s’écrie-t-elle ; et aussitôt une soudaine pâleur, comme une gaze étendue sur une rose empourprée, envahit ses joues ; elle tremble à cette révélation, et jette ses bras entrelacés autour du cou d’Adonis ; elle s’affaisse, toujours pendue a son cou ; elle tombe sur le dos, et il lui tombe sur le ventre.

C

La voilà enfin dans la lice même de l’amour ; son champion monté pour la joûte ardente. Mais elle reconnaît que tout est illusoire ; il a beau la monter, il ne veut pas la manier. Plus tourmentée que Tantale, elle étreint l’Élysée sans en obtenir les délices.

CI

Tels de pauvres oiseaux, déçus par des grappes peintes, se rassasient du regard sans assouvir leur appétit. Elle languit dans sa mésaventure, comme ces pauvres oiseaux à la vue des fruits chimériques. Les ardeurs qu’elle ne trouve point chez Adonis, elle cherche à les allumer par de continuels baisers.

CII

Mais tout est vain ; bonne déesse, cela ne sera pas. Elle a essayé de tous les moyens. Son plaidoyer eût mérité de meilleurs honoraires. Elle est l’amour, elle aime, et pourtant elle n’est pas aimée. « Fi ! fi ! s’écrie-t-il, vous m’étouffez ; laissez-moi partir ; vous n’avez pas de raison de me retenir ainsi. »