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VÉNUS ET ADONIS.

nimée allait éclipser la vivante ; de même le cheval d’Adonis l’emportait sur un cheval ordinaire par la forme, le courage, la couleur, l’allure et l’ossature.

L

Sabot arrondi, articulations souples, fanons velus et longs, large poitrail, œil vaste, petite tête et larges naseaux, haute encolure, oreilles courtes, jambes droites et plus que robustes, crinière épaisse, queue épaisse, large croupe, poil lisse, de tout ce que peut avoir un cheval, rien ne lui manquait, rien, hormis un cavalier superbe sur ce dos superbe !

LI

Parfois il se dérobe, et jette de loin un regard effaré ; parfois il tressaille au mouvement d’une plume ; il se met alors à jouter avec le vent, et l’on ne sait s’il court ou s’il vole. Le grand air chante à travers sa crinière et sa queue, éventant les poils qui oscillent comme des ailes.

LII

Il regarde sa bien-aimée et hennit vers elle, elle lui répond, comme si elle devinait sa pensée. Fière, comme toute femelle, de se voir recherchée, elle affecte une apparente aversion, fait la cruelle, résiste à l’amoureux et nargue l’ardeur qu’il ressent, en repoussant avec des ruades ses tendres caresses.

LIII

Alors, morose mécontent, il baisse sa queue qui, comme un panache retombant, projetait une ombre fraîche sur