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VÉNUS ET ADONIS.

XXX

Cependant la langoureuse reine d’amour était déjà trempée de sueur, car l’ombre avait déserté le lieu où ils étaient couchés, et Titan, paré des feux du midi, les dominait d’un regard brûlant, souhaitant qu’Adonis eût a diriger son char, pourvu que lui le remplaçât à côté de Vénus.

XXXI

Et alors Adonis, avec Faccent de l’indolence, d’un air ennuyé, sombre et dédaigneux, ses sourcils froncés couvrant son clair visage comme ces vapeurs brumeuses qui obscurcissent le ciel, — l’amertume aux joues, s’écrie : « Fi ! assez d’amour ! Le soleil me brûle la face ; il faut que je me retire. »

XXXII

« Hélas ! dit Vénus, si jeune et si cruel ! quel chétif prétexte tu prends pour t’en aller ! Je n’ai qu’à respirer, et le doux souffle de ma céleste haleine rafraîchira l’ardeur de ce soleil accablant ; je ferai pour toi une ombre de mes cheveux ; et, s’ils te brûlent aussi, je les mouillerai de mes larmes.

XXXIII

» Le soleil qui brille du haut du ciel n’a que de tièdes rayons, et vois, je suis entre ce soleil et toi. La chaleur que j’en reçois ne me gêne guère, mais tes yeux dardent la flamme qui me brûle ; et, si je n’étais immortelle, ma vie finirait entre ce soleil du ciel et ce soleil terrestre.