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SCÈNE I.

vaise ; — car, plus le cristal du ciel est pur, — plus hideux semblent les nuages qui y passent. — Encore une fois, pour aggraver encore le stigmate, — je t’enfonce dans la gorge le nom de traître infâme, — désirant, s’il plaît à mon souverain, ne pas sortir d’ici — que mon glaive justicier n’ait prouvé ce qu’affirme ma bouche.

norfolk.

— Que la froideur de mes paroles n’accuse pas ici mon zèle, — Ce n’est pas l’épreuve d’une guerre de femmes, l’aigre clameur de deux langues acharnées, — qui peut arbitrer ce litige entre nous deux. — Un sang qui bout ainsi veut être refroidi ; — pourtant je ne puis me vanter d’avoir la patience assez docile — pour garder le silence et ne rien dire du tout. — Je le déclare tout d’abord, mon profond respect pour Votre Altesse — m’empêche de lâcher les rênes et de donner de l’éperon à ma libre parole ; — sans quoi, elle s’emporterait jusqu’à lui rejeter — doublement à la gorge ce mot de trahison. — Mettons de côté la royauté de son sang auguste, — qu’il ne soit plus le cousin de mon suzerain ; — et je le défie, je lui crache au visage, — je l’appelle calomniateur, couard et vilain. — Ce que je suis prêt à maintenir en lui laissant tous les avantages — fussé-je, pour le rencontrer, obligé de gagner au pas de course — les crêtes glacées des Alpes — ou tout autre terrain inhabitable — que jamais Anglais ait osé fouler ! — En attendant, que ceci suffise à défendre ma loyauté : — par toutes mes espérances, il en a menti effrontément.

bolingbroke.

— Pâle et tremblant couard, je te jette mon gant, — abdiquant ici la parenté du roi. — Je mets de côté la royauté de mon sang auguste — que la peur, et non le respect, te fait récuser. — Si une coupable frayeur t’a laissé la force — de relever ce gage de mon honneur, eh