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EXTRAIT DE LA CHRONIQUE DE FROISSART.

s’appuya sur une fenêtre qui regardait dedans les jardins, et pensa un espace : et eut mainte imagination, et, quand il se retourna devers l’archevêque, il dit :

— Sire, vos paroles me donnent à penser. Envis j’entreprends cette chose et envis la laisse aller.

— Sire, répondit l’archevêque, appelez votre conseil et leur remontrez les paroles que je vous ai dites, et je leur remontrerai la cause pourquoi je suis ici venu. Ainsi je crois qu’ils ne vous conseilleront pas du contraire.

Adonc fit le comte d’Erby appeler son conseil, chevaliers et écuyers qui là étaient, èsquels il se fiait le plus. Quand ils furent entrés dans la chambre, le comte d’Erby fit audit archevêque recorder ses paroles. Après ledit comte en demanda conseil à ses hommes, pour savoir quelle chose en était bon de faire. Tous répondirent d’une suite, et dirent :

— Monseigneur, Dieu vous a regardé en pitié. Gardez-vous bien que jamais vous ne refusez ce marché, car jamais vous ne l’aurez meilleur ni plus beau.

Quand le comte d’Erby eut ouï parler son conseil, si ouvrit tous ses esprits et dit :

— Je ferai tout ce que vous voudrez.

Or fut là avisé par entre eux, et regardé comment ils pourraient passer la mer… Pour faire bref compte, le comte d’Erby ordonna toutes ses besognes par grande prudence et prit congé de tous les seigneurs de France. Toutes ces choses faites, il monta à cheval, lui et ses gens, et se départirent de Paris et issirent par la porte Saint-Jacques : et prirent le chemin d’Étampes, et tant chevauchèrent qu’ils vinrent à la ville de Blois, où ils furent environ huit jours, car le comte d’Erby envoya un de ses chevaliers et son héraut en Bretagne pour parler au duc, et signifier sa venue. Quand le duc Jehan de