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EXTRAIT DE LA CHRONIQUE DE FROISSART.

tira arrière, et se tint tout droit un espace sans rien dire. Quand il eut pensé un petit, il se tira avant, et prit son chaperon en sa main, et vint devant le roi et le comte maréchal, et dit :

— Comte maréchal, je dis que tu es faux, mauvais et traître, et pour ce je prouverai mon corps contre le tien, et voilà mon gage.

Le comte maréchal répondit : — Je mets votre parole en l’entente du roi et de tous les seigneurs qui sont ici, et vous tournerez votre parole et la mienne en vérité.

A donc se tira chacun des comtes entre ses gens : et furent là perdues ordonnances de donner vin et épices, car le roi montra qu’il fut grandement courroucé, et se retira dedans la chambre, et là s’enclôt… Le comte d’Erby s’en vint demeurer à Londres et tenir son état (car il y avait son hôtel) et furent pour lui pleiges le duc de Lanclastre[1] son père le duc d’Iorck[2], son oncle, le comte de Northombellande[3], et moult de hauts barons d’Angleterre, car il y était bien aimé. Le comte maréchal fut envoyé au château de Londres (qu’on dit la Tour) et là tint son état : et se pourvurent ces deux seigneurs grandement de ce que pour le champ appartenait : et envoya le comte d’Erby grands messagers en Lombardie devers le duc de Milan, messire Galéas, pour avoir armure à son point et à sa volonté. Le dit duc descendit moult joyeusement à la prière du comte d’Erby ; et mit un chevalier (qui se nommait messire François et que le comte d’Erby avait là envoyé) à choix de toutes ses armures, pour servir le dit comte. Quand le chevalier eut choisi par toutes les armures, tant de

  1. Jean de Gand dans le drame.
  2. Le duc d’York.
  3. Le comte de Northumberland.