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HENRY IV.

des bras de son gardien ; ainsi mes membres, — affaiblis par la douleur, mais maintenant surexcités par elle, — ont une triple énergie. Loin de moi donc, béquille débile ! — Désormais c’est un gantelet de maille aux jointures d’acier — qui doit ganter cette main. Loin de moi aussi, coiffe de malade ! — tu es un cimier trop mou pour une tête — que visent des princes, gorgés de victoires ! — Désormais que le fer ceigne mon front ! Et que — l’heure la plus rude que puissent amener le temps et la haine — vienne menacer l’enragé Northumberland ! — Que le ciel et la terre s’étreignent ! que désormais la main de la nature — cesse de tenir enchaîné le flot furieux ! que l’ordre périsse ! — et que le monde ne soit plus un théâtre — où les luttes se prolongent en actes languissants ; — mais que l’unique esprit du premier-né Caïn — règne dans tous les cœurs, en sorte que tous les esprits étant voués — à de sanglantes carrières, le rude drame puisse finir, — et la nuit ensevelir les morts !

travers.

— Cette violente émotion vous fait mal, milord.

lord bardolphe.

— Cher comte, que Votre Honneur ne divorce pas avec la sagesse.

morton.

— La vie de tous vos partisans dévoués — repose sur votre santé qui, si vous vous abandonnez — à ces frénétiques émotions, ne peut manquer de s’affaiblir, — Vous aviez pesé les conséquences de la guerre, mon noble lord, — vous en aviez calculé les hasards, avant de dire : — Révoltons-nous ! Vous aviez prévu — que, dans la répartition des coups, votre fils pouvait succomber ; — vous saviez que, marchant au milieu des périls, sur le bord d’un précipice, — il avait plus de chance d’y tomber que de le franchir. — Vous aviez conscience que sa