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SCÈNE III.

que vous avez été dupés, écartés et repoussés — par celui pour qui vous avez subi toutes ces hontes ? — Non ! il est temps encore de racheter — votre honneur banni et de vous relever — dans l’estime du monde. — Vengez-vous des moqueries et des dédaigneux mépris — de ce roi altier, qui songe nuit et jour — à s’acquitter de tout ce qu’il vous doit — par le sanglant paiement de votre mort. — Je dis donc…

worcester.

Silence, mon neveu, n’en dites pas davantage. — Maintenant, je vais ouvrir le fermoir d’un livre secret, — et lire à votre mécontentement, si prompt a tout saisir, — une œuvre profonde, dangereuse, — pleine de périls, pour l’achèvement de laquelle il faut autant d’audace aventureuse — que pour franchir un torrent qui rugit — sur le chancelant étai d’une lancé.

hotspur.

— Si l’on tombe, bonsoir !… il faut sombrer ou nager… — Déchaînez le Danger de l’est à l’ouest, — pourvu que du nord au sud il rencontre l’Honneur, — et laissez-les aux prises… Oh ! le cœur bat mieux — à traquer un lion qu’à lever un lièvre.

northumberland.

— La pensée de quelque grand exploit — l’emporte au delà des bornes de la patience.

hotspur.

— Par le ciel, je serais tenté de m’élancer — jusqu’à la face pâle de la lune pour en arracher l’Honneur éclatant, — ou de plonger dans les abîmes de l’Océan, — jusqu’à des profondeurs restées inaccessibles à la sonde, — pour en retirer par les cheveux l’Honneur englouti — si le libérateur pouvait recueillir, — seul et sans rival, toute la gloire de son action. — Mais foin d’une médaille partagée !