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RICHARD II.

dats armés, avant que son roi natal — chancelle sous les coups d’une infâme rébellion.

l’évêque de carlisle.

— Ne craignez rien, milord. Le pouvoir qui vous a fait roi — aura le pouvoir de vous maintenir roi, en dépit de tout. — Les moyens que présente le ciel, il faut les saisir, — et non les négliger ; autrement, si, quand le ciel veut, — nous ne voulons pas, nous repoussons les offres du ciel, — les moyens providentiels de secours et de salut.

aumerle.

— Il veut dire, milord, que nous sommes trop indolents, — tandis que Bolingbroke, grâce à notre sécurité, — s’agrandit et se renforce en ressources et en amis.

richard.

— Désespérant cousin ! ne sais-tu pas — que, quand l’œil pénétrant du ciel est caché — derrière le globe et éclaire le monde inférieur, — alors voleurs et bandits se répandent partout, invisibles — et sanglants, en meurtres et en outrages ; — mais sitôt que, sortant de dessous cette sphère terrestre, — l’astre embrase à l’orient les fières cimes des pins — et darde sa lumière dans tous les antres coupables, — alors les meurtres, les trahisons et les crimes détestés, — n’ayant plus sur les épaules le manteau de la nuit, — restent découverts et nus, tout tremblants d’eux-mêmes ? — Ainsi, quand ce voleur, ce traître Bolingbroke, — qui s’ébattait dans la nuit, — tandis que nous errions aux antipodes (13), — nous verra remonter sur le trône, notre orient, — sa trahison apparaîtra rougissant sur sa face, — et, incapable d’endurer la vue du jour, — épouvantée d’elle-même, elle tremblera de ses crimes. — Toutes les eaux de la mer orageuse et rude — ne sauraient laver du front d’un roi l’onction sacrée. — Le souffle des humains ne saurait déposer — le