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RICHARD II.

vanouir avec ma vie, — que je serais heureux de mourir !


Entrent le Roi Richard, la Reine, Aumerle (8), Bushy, Green, Bagot, Rose et Willoughby.
york.

— Le roi est venu : ménagez sa jeunesse ; — car les jeunes poulains ardents deviennent furieux quand on les irrite.

la reine.

— Comment se porte notre noble oncle Lancastre ?

richard.

— Comment va, l’homme ? Comment se porte le vieux Gand ?

jean de gand.

— Oh ! que ce nom convient à ma personne ! — Vieux gant, en vérité, vieille peau racornie ! — En moi la douleur a gardé un long jeûne fastidieux ; — et qui peut jeûner sans se dessécher ? — J’ai longtemps veillé l’Angleterre endormie ; — les veilles amènent la maigreur, et la maigreur est toute décharnée. — Ce bonheur qui soutient un père, — la vue de mes enfants, j’en ai été strictement sevré, — et c’est par cette privation que tu as fait de moi ce que je suis, — un vieux gant bon à jeter dans la fosse, une vieille peau — dont hérite la matrice profonde de la tombe !

richard.

— Un malade peut-il jouer si subtilement sur son nom !

jean de gand.

— Non ! ma misère s’amuse à se moquer d’elle-même ; — puisque tu veux détruire mon nom avec moi, — car je me moque de mon nom, grand roi, pour te flatter.

richard.

— Les mourants devraient-ils flatter ceux qui vivent ?