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RICHARD II.

j’aurais mieux aimé — que vous m’eussiez dit d’argumenter en père. — Oh ! si c’eût été un étranger, et non mon enfant, — j’aurais eu plus d’indulgence pour pallier sa faute ; j’ai tenu à éviter l’imputation de partialité, — et j’ai par ma sentence détruit ma propre vie. — Hélas ! j’espérais qu’un de vous me dirait — que j’étais trop rigoureux de me défaire ainsi de mon bien ; — mais vous avez souffert que ma langue — me fît, contre mon gré, ce mal involontaire.

richard.

— Cousin, adieu… Toi aussi, mon oncle, dis-lui adieu : — nous le bannissons pour six ans ; il faut qu’il parte.

Fanfares. Sortent Richard et sa suite.
aumerle.

— Cousin, adieu : ce que votre personne ne pourra plus nous dire, — signifiez-le par écrit du lieu de votre résidence.

le maréchal.

— Moi, milord, je ne prends pas congé de vous ; car je compte vous escorter — à cheval, aussi loin que le permettra cette terre.

jean de gand.

— Oh ! pourquoi thésaurises-tu tes paroles, — et ne réponds-tu pas aux effusions de tes amis ?

bolingbroke.

— Les paroles me manquent pour vous faire mes adieux, — au moment même où ma langue devrait les prodiguer — pour exhaler la douleur exubérante de mon cœur.

jean de gand.

— Ton chagrin n’est qu’une absence temporaire.

bolingbroke.

— En l’absence de la joie, le chagrin est toujours présent.