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SCÈNE XIV.

premier sénateur.

Voilà qui est bien parlé.

timon.

— Recommandez-moi à mes aimables compatriotes.

premier sénateur.

— Ces mots sont dignes des lèvres par lesquelles ils passent.

deuxième sénateur.

— Et ils entrent dans notre oreille, comme de grands victorieux — sous la porte triomphale.

timon.

Recommandez-moi bien à eux, — et dites-leur que, pour les délivrer de leurs chagrins, — de leur crainte des coups ennemis, de leurs souffrances, de leurs détresses, — de leurs peines d’amour et de toutes les douleurs incidentes — qui assaillent le fragile vaisseau de notre nature — dans le voyage hasardeux de la vie, je veux leur rendre un service ; — je veux les mettre à même de prévenir la furie du farouche Alcibiade.

deuxième sénateur.

— Voilà qu’il me plaît : il nous reviendra.

timon.

— J’ai ici, dans mon clos, un arbre — que pour ma propre commodité je suis obligé d’abattre, — et que je ne dois pas tarder à couper. Dites à mes amis, — dites aux Athéniens, grands et petits, — en suivant l’ordre hiérarchique, que quiconque désire — mettre fin à son affliction, se dépêche — de venir ici pour se pendre, avant que la hache ait frappé mon arbre. — Je vous en prie, transmettez mon message.

flavius.

— Ne le troublez plus ; vous le trouverez toujours le même.