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SCÈNE X.

se soûlait volontiers aussi ; permettez-moi de vous l’apprendre.

le duc.

Vous lui faites injure, sûrement.

lucio.

Monsieur, j’étais de ses intimes. C’était un gaillard sournois que le duc, et je crois savoir la cause de sa disparition.

le duc.

Et quelle peut en être la cause, je vous prie ?

lucio.

Non, pardon. C’est un secret qui doit être renfermé entre les dents et les lèvres ; mais, je puis vous confier ceci… Le plus grand nombre de ses sujets tenait le duc pour sage.

le duc.

Sage ? Eh ! sans nul doute, il l’était.

lucio.

C’est un gaillard très-superficiel, très-ignare et très-léger.

le duc.

Il y a de votre part envie, sottise ou méprise. Le cours même de son existence et la manière dont il a gouverné devraient, au besoin, lui assurer un meilleur renom. Que seulement on le juge sur ses propres actes, et l’envieux reconnaîtra en lui un savant, un homme d’État, un soldat ! Ainsi, vous parlez en ignorant ; ou, si vous êtes bien informé, la malveillance vous aveugle fort.

lucio.

Monsieur, je connais le duc et je l’aime.

le duc.

L’amitié s’exprimerait avec une plus intime connaissance, et la connaissance avec une plus sympathique amitié. amitié.