Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1869, tome 6.djvu/472

Cette page a été validée par deux contributeurs.
474
474
LA SAUVAGE APPRIVOISÉE, ETC.
partons pour l’église, — car je ne porterai pas d’autre habit de noce.
Il sort.
ALFONSO.

— Allons, messieurs ! venez avez nous. — Car, quoi que nous fassions, il voudra se marier ainsi.

Tous sortent.
(Extrait d’Une Sauvage apprivoisée 1594).
(15) L’immense supériorité de la comédie refaite sur la comédie primitive n’est nulle part plus éclatante que dans cette scène. Combien le départ de Ferando nous laisse froids, comparé à la saisissante sortie de Petruchio entraînant Catharina l’épée à la main !
FERANDO.

— Père, adieu. Ma Cateau et moi, il faut que nous allions chez nous.

À Sander.

— Maraud, va préparer mon cheval tout de suite.

ALFONSO.

— Votre cheval ! Ah çà, fils, vous plaisantez, j’espère, — Je suis sûr que vous ne partirez pas si brusquement.

CATHERINE.

— Qu’il parte ou qu’il demeure, je suis résolue à rester — et à ne pas voyager le jour de mes noces.

FERANDO.

— Assez, Cateau. Je te dis qu’il faut que nous allions chez nous… — Manant, as-tu sellé mon cheval ?

SANDER.

— Quel cheval ? Votre courtaud ?

FERANDO.

— Tudieu ! drôle, allez vous rester à jaser ici ? Sellez le cheval hongre de votre maîtresse.

CATHERINE.

— Non, pas pour moi, car je ne veux pas partir.

SANDER.

— L’hôtelier ne veut pas me le laisser prendre, sous prétexte que vous lui devez dix deniers — pour sa nourriture et six pour avoir rembourré la selle de madame.

FERANDO.

— Tiens, drôle, paye-le immédiatement.

SANDER.

— Lui donnerai-je un autre picotin de lavande ?

FERANDO.

— Décampe, maroufle, et amène-les immédiatement à la porte.

ALFONSO.

— Allons, fils, j’espère qu’au moins vous dînerez avec nous.

SANDER.

— Je vous en prie, maître, restons jusqu’à ce que le dîner soit fini.