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PEINES D'AMOUR PERDUES.

vos signatures, — pour que quiconque violera le moindre article de la convention — voie son honneur frappé par sa propre main ! — Si vous vous sentez assez forts pour faire ce que vous avez juré de faire, — signez votre serment et tenez-le.

LONGUEVILLE.

— Je suis résolu : ce n’est qu’un jeûne de trois ans ; — l’âme fera bonne chère tandis que le corps pâtira. — À large panse maigre cervelle ! les morceaux succulents, — s’ils enrichissent la chair, mettent l’esprit en banqueroute.

DU MAINE.

— Mon aimable seigneur, Du Maine est déjà mortifié ; — il abandonne aux vils esclaves d’un monde grossier — la grossière habitude des jouissances de ce monde. — Je renonce et je meurs à l’amour, au luxe et à la pompe, — pour vivre avec vous dans la philosophie !

BIRON.

— Je ne puis que répéter la même protestation, — ayant déjà juré, cher suzerain, — de vivre et d’étudier ici trois ans. — Mais il est d’autres vœux, rigides, — comme de ne pas voir de femmes pendant tout ce temps-là : — j’espère bien que cette condition n’est pas dans l’acte ; comme de vivre un jour de la semaine sans toucher un aliment, — et les autres jours avec un seul repas : — j’espère que cette condition n’est pas dans l’acte : — comme aussi de ne dormir que trois heures la nuit, — et de ne pas fermer l’œil de toute la journée ! — moi qui suis habitué à dormir sans remords toute la nuit — et même à faire une nuit épaisse de la moitié du jour : — j’espère bien que cette condition-là non plus n’est pas dans l’acte. — Oh ! ce sont des mortifications trop dures à subir : ne pas voir de dames, étudier, jeûner et ne pas dormir !