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TOUT EST BIEN QUI FINIT BIEN.
ciel, qui peut m’employer à ton bonheur, — de me dire la vérité.
HÉLÈNE.

Bonne madame, pardonnez-moi.

LA COMTESSE.

— Aimez-vous mon fils ?

HÉLÈNE.

Votre pardon, noble maîtresse !

LA COMTESSE.

— Aimez-vous mon fils ?

HÉLÈNE.

Est-ce que vous ne l’aimez pas, madame ?

LA COMTESSE.

— Point de détours. Mon amour pour lui est un attachement — que je laisse voir au monde entier. Allons ! allons ! révélez-moi — l’état de votre cœur ; car votre émotion — vous accuse hautement.

HÉLÈNE, s’agenouillant.

Eh bien, je confesse — ici, à genoux, devant le ciel et vous, qu’ayant vous-même et après le ciel, — votre fils a mon amour ! — Mes parents étaient pauvres, mais honnêtes : ainsi est ma tendresse. — N’en soyez pas offensée, cela ne lui fait pas de mal d’être aimé de moi ; je ne le poursuis — d’aucune présomptueuse avance ; — je ne voudrais pas de lui avant de l’avoir mérité, — et pourtant je ne sais pas comment je puis le mériter jamais, — Je sais que j’aime en vain, que je me débats contre l’espérance ; — n’importe ! le vaste crible a beau fuir, — je ne cesse d’y verser les eaux de mon amour — qui ne cessent de s’y perdre. Ainsi, pareille à l’Indien, — dans ma religieuse erreur, je rends un culte — au soleil qui rayonne sur son adorateur — et ne le connaît que pour l’illuminer. Bien chère madame, — ne me rendez pas en haine l’amour — que j’ai pour celui que vous