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LA SAUVAGE APPRIVOISÉE.

GREMIO.

— Le tien n’est que de la mousse. — Arrière, freluquet ; la maturité, c’est le fruit.

TRANIO.

— Mais la jeunesse, aux yeux des belles, c’est la fleur.

BAPTISTA.

— Calmez-vous, messieurs, je vais arracher ce différend ; — c’est par des faits qu’il faut gagner le prix ; et celui de vous deux — qui peut assurer à ma fille la plus grosse dot aura l’amour de Bianca. — Dites, signor Gremio, que pouvez-vous lui assurer ?

GREMIO.

— Et d’abord, comme vous savez, ma maison de ville — est richement fournie de vaisselle d’or et d’argent, — de bassins et d’aiguières pour laver ses mains délicates. — Mes courtines sont toutes des tapisseries de Tyr ; — j’ai rembourré d’écus mes coffres d’ivoire ; — tenture de haute lice, courte-pointes, — vêtements, rideaux et lambrequins coûteux, — linge fin, coussins de Turquie rehaussés de perles, — dentelle de Venise lamée d’or, — service d’étain et de cuivre, j’ai dans des caisses de cyprès tout ce qui est nécessaire — à une maison et à un ménage. En outre, dans ma ferme, — j’ai cent vaches à l’abreuvoir, — cent vingt bœufs gras à l’étable, — et tout le reste en proportion. — Je suis moi-même chargé d’années, je dois le confesser ; — mais, que je meure demain, et tout cela est à elle, — si ma vie durant elle consent à être à moi.

TRANIO.

— Il n’y a de bon dans tout cela que la conclusion.

À Baptista.

Monsieur, écoutez-moi. — Je suis l’unique fils et héritier de mon père. — Si je puis avoir votre fille pour femme, — je lui laisserai dans les murs de l’opulente